Là où beaucoup se contentent de servir la soupe sur un sujet forcément torturé forcément auto-destructeur, interprété par un acteur en chasse pour une statuette quelconque et "habité" par son rôle, avec Chasseur blanc, coeur noir (1990 - White Hunter, Black Heart) Clint Eastwood décide - en adaptant le roman éponyme - de raconter John Huston dans l'avant-tournage de L'Odyssée de L'African Queen (1951 - The African Queen), à travers la voix de son ami et scénariste sur le film, Peter Viertel et ainsi d'offrir un point de vue, certes amoureux et empreint de respect vis-à-vis de Huston, mais aussi complexe et surtout dépourvu de tout le mélodramatisme mielleux de rigueur, de la déférence excessive qui mine ce genre particulier, souvent bourré de tics et d'effets grandiloquents.
Outre le fait que Chasseur blanc, cœur noir dresse un portrait collectif doucement mélancolique d'un âge d'or du cinéma hollywoodien déjà à son crépuscule, la réussite du film tient peut-être aussi dans ce choix plein d'humilité de ne pas raconter la vie d'un homme, mais simplement un moment de celle-ci, aussi parlant soit-il.
De l'enfance sûrement pénible et douloureuse de Huston nous ne saurons rien, nul flash-back ... le film adopte une narration des plus classique et linéaire, Eastwood ne cherchant jamais à expliquer ou justifier son protagoniste, simplement à le montrer, à nous le dévoiler un peu, avec simplicité, bienveillance et légèreté.
Avec gravité aussi, comme dans cette fin qui donne son titre au film, et qui apporte une consistance à ce personnage caractériel et buté, obsédé par des démons dont nous ignorerons tout sauf la présence en son cœur, noir donc.